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Joseph John vs République Unie de Tanzanie

Le 19 Février 2018, M. Joseph John (le Requérant) a déposé une requête introductive d’instance contre la République Unie de Tanzanie devant la Cour Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples (la CADHP ou la Cour) pour des violations alléguées de la Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples (la Charte) en son article 7.

Le requérant, âgé de 16 ans au moment des faits a été accusé de viol sur une mineure de 17 ans et a été jugé et condamné par le Tribunal de district de Kahama le 24 Août 2010. Cette décision a par la suite été confirmée par la Haute Cour de Tabora le 14 Août 2012 puis la Cour d’appel de Tanzanie le 24 Septembre 2013. Au moment du dépôt de la présence requête il servait une peine de 30 ans à la prison centrale d’Uyui.

Le 21 Novembre 2019, la République de Tanzanie a déposé les instruments de retrait de la déclaration de compétence de la Cour de recevoir des requêtes émanant des individus et des organisations non gouvernementales. En rendant sa décision le 22 Septembre 2022, la Cour a été fidèle à sa jurisprudence constante de traiter toutes les affaires enrôlées au greffe avant la date d’entrée en vigueur du retrait de la déclaration.

De manière liminaire, la Tanzanie a soulevé des exceptions d’incompétence et d’irrecevabilité de la requête. Après examen des moyens présentés, la Cour a conclu à la recevabilité de l’affaire et s’est déclarée compétente pour en connaître. Elle s’est ensuite tournée sur le fond de l’affaire. 

  • S’agissant tout d’abord de l’allégation de la violation de son droit à la libération sous caution (article 7.(1) de la Charte), le requérant soutient qu’en ne l’informant pas de la possibilité de son droit à demander la liberté conditionnelle, la Tanzanie a violé son droit à son procès équitable. La Tanzanie pour sa part rétorque que ce point n’a été abordé qu’après que la question des réparations a été soulevée. La Cour a conclu qu’elle pouvait répondre à cette question et que le droit à la mise en liberté sous caution est un principe fondamental du droit à la liberté et que l’omission par l’Etat défendeur d’informer le requérant de ce droit est une violation de l’article 6 de la Charte.
  • S’agissant ensuite de l’allégation de la violation de son droit à l’assistance judiciaire (article 7.(1).(c) de la Charte), le requérant allègue qu’étant indigent, il était impérieux de bénéficier d’une assistance judiciaire dans la mesure où il était jugé pour un crime considéré comme grave. La Tanzanie répond pour sa part que le requérant n’en a jamais fait la demande. La Cour, reprenant ici sa jurisprudence constante, conclut que dans les circonstances de l’espèce, l’Etat se devait, d’office et gratuitement se devait d’offrir une assistance judiciaire au requérant. Ne l’ayant pas fait, la Tanzanie a donc bel et bien violé l’article 7(1) de la Charte.
  • S’agissant encore de l’allégation de la violation de son droit à être jugé dans un délai raisonnable (article 7(1)(d) de la Charte), le requérant note qu’il est resté en garde à vue pendant plus de 24 heures et a été mis en accusation 3 mois après avoir été mis aux arrêts. La Tanzanie pour sa part affirme que l’affaire a été jugée en première instance sur une période d’un an un délai, somme toute raisonnable, compte tenu de la nature de l’infraction et des circonstances de l’affaire. La Cour a donné raison à l’Etat défendeur.
  • S’agissant enfin de l’allégation de la violation de son droit d’être jugé par un tribunal pour mineur, le requérant affirme qu’il était âgé de moins de 16 ans au moment des faits. La Tanzanie affirme que le compte rendu de l’audience devant la Cour d’appel notait qu’il était âgé de 20 ans au moment de sa mise en accusation. En se basant sur les documents fournis, la Cour a conclu que le requérant était bel et bien majeur au moment de l’instruction d’instance.

La Cour a rejeté la demande de remise en liberté formulée par le requérant et a accordé 600.000 Shillings Tanzaniens au requérant pour préjudice moral subi. Cette somme devra être versée au requérant en franchise d’impôt dans les 6 mois de la notification de cette décision, sous peine de devoir payer des intérêts moratoires. 

Jugement du 22-09-2022.pdf

Ce résumé des faits de l’espèce et de la procédure est uniquement proposé à des fins d’information, n’engage en rien Dome et ne saurait remplacer la lecture attentive des jugements et ordonnances de l’affaire.