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Anudo Ochieng Anudo vs République de Tanzanie

Le 24 Mai 2015, M. Ochieng Anudo requérant, a déposé devant la Cour Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples (la Cour) pour des violations alléguées de la Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples (la Charte) en ses articles 7, 12 et 13 ainsi que de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme (DUDH) en son article 15.

En effet, le Requérant soutient qu’essayant d’accomplir des formalités administratives, les autorités Tanzaniennes ont saisi son passeport au motif que sa nationalite tanzanienne avait suscité des soupçons. Sa nationalité tanzanienne lui a été retirée, il a été expulsé au Kenya d’où il a été ré-expulsé en Tanzanie, mais ne pouvant plus rentrer en Tanzanie, il a été dans une zone tampon entre les deux pays dans des conditions de précarité et d’insécurité totales. Il affirme avoir écrit au Ministère de l’Intérieur pour s’enquérir des raisons de la saisie de son passeport, ainsi que Bureau chargé de la prévention et de la lutte contre la corruption, pour l’informer du fait que les agents de l’immigration lui ont demandé de leur donner des pots de vin, ce qu’il s’est refusé de faire. Il a par la suite été détenu et maltraité pendant 7 jours avant d’être une fois de plus ramené à la frontière Kenyane.

La Tanzanie a quant à elle affirmé avoir mené une enquête minutieuse dans le village de naissance du Requérant et vérifié les documents de ce dernier avant d’arriver à la conclusion que M. Anudo n’était pas véritablement citoyen Tanzanien.

Le Requérant affirme que la Tanzanie a violé les dispositions de la Charte et de la DUDH.

Le 21 Novembre 2019, la République de Tanzanie a déposé les instruments de retrait de la déclaration de compétence de la Cour de recevoir des requêtes émanant des individus et des organisations non gouvernementales. En rendant sa décision le 02 Décembre 2021, la Cour a été fidèle à sa jurisprudence constante de traiter toutes les affaires enrôlées au greffe avant la date d’entrée en vigueur du retrait de la déclaration.

De manière liminaire, la Tanzanie a soulevé des exceptions d’incompétence et d’irrecevabilité de la requête. Après examen des moyens présentés, la Cour a conclu à la recevabilité de l’affaire et s’est déclarée compétente pour en connaître. Elle s’est ensuite tournée sur le fond de l’affaire:

S’agissant tout d’abord de la violation découlant de la déchéance de la nationalité et des droits connexes, le requérant soutient que:

  • Son droit à la nationalité et à ne pas être arbitrairement privé de ce droit a été violé dans la mesure où il a été considéré comme citoyen Tanzanien depuis sa naissance de deux parents Tanzaniens à l’âge de 33 ans, lorsqu’il a souhaité accomplir certaines formalités. L’Etat défendeur soutient que M. Ochieng Anudo a reçu son passeport sur présentation de faux documents. La Cour note que la question à régler dans ce moyen est de savoir si le retrait de la nationalité Tanzanienne a été faite conformément aux normes internationales en vigueur et dans le respect des Droits de l’Homme. En l’espèce, la charge de la preuve repose sur l’Etat Tanzanien qui aurait pu faire droit à la demande du père du Requérant (dont la nationalité n’est pas contestée) de procéder à un test ADN afin d’avoir une réponse claire sur la filiation de ce dernier. N’ayant pas souscrit à cette requête, la Cour estime que la décision de retrait de la nationalité du requérant était arbitraire et non conforme à l’article 15 de la DUDH.
  • Son droit de résider, quitter et revenir dans son pays a été violé: la Cour note qu’entre la date de son arrestation et celle de son expulsion du territoire, il s’est écoulé exactement sept jours pendant lesquels le Requérant était détenu dans un poste de police et donc n’avait aucune possibilité de recours. Une telle procédure est contraire aux prescriptions du droit international. Les circonstances de son expulsion étaient elles aussi contraires aux normes applicables. La Cour a donc conclu que la Tanzanie avait violé l’article 12(2) de la Charte et 13 PIDCP;
  • Son droit d’être entendu par un juge a été bafoué, puisqu’il n’ a été présenté devant aucune juridiction entre le moment où il a été arrêté et celui où il a été déporté: La Cour conclut qu’en déclarant le Requérant  “immigrant illégal”, lui déniant ainsi la nationalité tanzanienne dont il jouissait jusqu’alors, sans lui accorder la possibilite d’un recours devant une juridiction nationale, l’Etat défendeur a violé son droit à ce que sa cause soit entendue par un juge au sens de l’article 7(1) de la Charte.

Le Requérant affirme aussi par effet ricochet, la décision de lui retirer son passeport et sa nationalité a entraîné d’autres violations de ses droits garantis par la Charte et autres instruments internationaux, tels que : le droit au travail (art 15 de la Charte), le droit de se marier et de fonder une famille (art 23 de la Charte) ou encore le droit à la liberté, sécurité de sa personne et à la protection contre les arrestations ou les détentions arbitraires (art 6 de la Charte).

La Cour a précisé qu’elle n’avait pas le pouvoir d’ordonner l’annulation de la décision des services de l’immigration portant son expulsion comme le demande le Requérant au Paragraphe 122.

Jugement-du-22-03-2018.pdf

Le 21 Novembre 2019, la République de Tanzanie a déposé les instruments de retrait de la déclaration de compétence de la Cour de recevoir des requêtes émanant des individus et des organisations non gouvernementales. En rendant sa décision le 02 Décembre 2021, la Cour a été fidèle à sa jurisprudence constante de traiter toutes les affaires enrôlées au greffe avant la date d’entrée en vigueur du retrait de la déclaration.

Elle a accordé au Requérant la somme de 179 Millions de Shilling Tanzaniens en réparation des préjudices matériels et moraux, ainsi que 50 millions pour les victimes indirectes à savoir les enfants et les parents de M. Ochieng Anudo.

Jugement du 02-12-2021.pdf

Ce résumé des faits de l’espèce et de la procédure est uniquement proposé à des fins d’infomation, n’engage en rien Dome et ne saurait remplacer la lecture attentive des jugements et ordonnances de l’affaire.