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Affaire Chrizostom Benyoma vs République Unie de Tanzanie

Le 04 Janvier 2016, M. Chrizostom Benyoma, requérant, a introduit devant la Cour Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples (la Cour) une requête introductive d’instance contre la République Unie de Tanzanie concernant des violations alléguées de la Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples (la Charte) en ses articles 3(1) et (2), 7 (1) (c) et (d).

En effet, M. Benyoma, citoyen Tanzanien, purgeait au moment de l’introduction d’instance une peine d’emprisonnement à perpétuité pour viol sur une mineure de moins de 15 ans, commis le 20 Janvier 2000. Le jugement a été prononcé le 28 Février 2000 par le Tribunal de district de Karagwe à Kayanga. Le requérant a interjeté appel de cette décision successivement devant la Haute Cour de Bukoba et la Cour d’appel de Mwanza. Les deux juridictions ont confirmé le jugement entrepris.

Le 11 Février 2013, le requérant a introduit un recours en révision de la déclaration d’appel, lequel n’était pas encore tranché au moment de l’introduction d’instance devant la Cour. M. Benyoma soutient que son droit à un procès équitable et jugé dans un délai raisonnable n’a pas été respecté tout au long de la procédure devant les juridictions nationales. 

Le 21 Novembre 2019, la République de Tanzanie a déposé les instruments de retrait de la déclaration de compétence de la Cour de recevoir des requêtes émanant des individus et des organisations non gouvernementales. En rendant sa décision le 30 Septembre 2021, la Cour a été fidèle à sa jurisprudence constante de traiter toutes les affaires enrôlées au greffe avant la date d’entrée en vigueur du retrait de la déclaration.

De manière liminaire, la Tanzanie a soulevé des exceptions d’incompétence et d’irrecevabilité de la requête. Après examen des moyens présentés, la Cour a conclu à la recevabilité de l’affaire et s’est déclarée compétente pour en connaître. Elle s’est ensuite tournée sur le fond de l’affaire:

  • S’agissant tout d’abord de l’allégation de violation du droit à un procès équitable protégé par l’article 7(1) de la Charte, le requérant soutient que d’une part:
    • Il a été privé de ce que son droit à ce que sa cause soit entendue: il affirme que ses aveux ont été recueillis de manière irrégulière, ce dont l’Etat défendeur se défend en soulignant que la procédure établie à l’article 228(2) du Code Pénal Tanzanien a été scrupuleusement respectée. Après examen des faits de la cause, la Cour a conclu que rien ne permettait d’affirmer que M. Benyoma avait été privé du droit à ce que sa cause soit entendue;
    • Il n’a pas bénéficié de la représentation adéquate devant les tribunaux conformément à l’article 7(1)(c) et 8(1) de la Charte, ce qui devrait selon lui, invalider sa sentence. La Tanzanie a rétorqué que l’assistance judiciaire gratuite était automatique pour les crimes jugés “graves”, autrement l’accusé devait la demander. La Cour a cependant rappelé sa jurisprudence constante selon laquelle elle interprète l’article 7 (1) (c) de la Charte à la lumière de l’article 14(3)(d) du Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP). De plus, lorsque les accusés sont indigents et que les peines considérées sont lourdes, l’assistance judiciaire doit leur être fournie qu’ils en fassent la demande ou non. N’ayant pas souscrit à cette obligation, la Tanzanie a violé ses obligations au regard de l’article 7 (1) (c) de la Charte;
    • Il a été privé de son droit à être jugé dans un délai raisonnable, prévu par l’article 7 (1) (d) de la Charte. La Cour n’a cependant pas abondé dans son sens.
  • S’agissant enfin de l’allégation de violation des droits à l’égalité devant la loi et à une égale protection de la loi protégée à par les articles 3(1) et (2) de la Charte, la Cour note que le Requérant n’a pas démontré qu’il a été traité différemment des autres personnes condamnées comme lui sur la base d’un plaider-coupable du chef de viol.

La Cour a ordonné le paiment de 30.000 Shilling Tanzaniens en réparation du préjudice moral créé par le manque d’assistance judiciaire tout au long des procédures devant les juridictions nationales.

Jugement du 30-09-2021.pdf

Ce résumé des faits de l’espèce et de la procédure est uniquement proposé à des fins d’infomation, n’engage en rien Dome et ne saurait remplacer la lecture attentive des jugements et ordonnances de l’affaire.